Hic Rosa, Partition botanique de Anne-Marie Faux

À l’initiative de l’association Les Yeux de l’Ouïe, des cinéastes documentaristes poursuivent une réflexion publique dans un atelier ouvert à tous, une réflexion qui réactive un espace critique susceptible d’explorer la puissance d’un cinéma documentaire s’attachant à renouveler ses formes
et son mode de présence au monde. Quel geste cinématographique aujourd’hui ?

Hic Rosa, Partition botanique de Anne-Marie Faux

France – 2006 – Les films du Worso – 57 mn

Masqué derrière le nom de la plus fameuse des fleurs, s’avance ici un hommage. A quoi? à la couleur rouge; aux femmes empourprées. Aux femmes enragées de justice comme Rosa Luxembourg; aux femmes engagées dans l’exactitude austère d’un art de la vérité comme Danièle Huillet. Car, c’est assez net et les dates du sous-titre en générique le confirment (1916/1936/2006), les voix de l’une et de l’autre traversent la “partition botanique” qu’égrènent les images. C’est le souci d’exactitude de la dernière qui s’entend dans la diction des lettres écrites en 1916 par la première. Si Rosa Luxembourg est connue pour avoir été l’organisatrice héroïque spartakiste, assassinée par la police en 1919, c’est un autre timbre que celui du militantisme combattant qui résonne ici. “Vous souvenez-vous de ce que nous avons projeté de taire quand la guerre sera finie?”, écrit-elle, entend-on, à l’un de ses correspondants. Tel est le sujet de ses courriers: la mémoire certaine de l’après. Le rappel aussi instistant qu’une hantise, de la cause même pour laquelle la lutte doit être menée. Si une révolution doit être entreprise, et avec toute la dévotion nécessaire, c’est, pour s’excepter d’un projet animé au rationnel. A quelles fins alors? Pour retrouver l’innicence gracieuse et inconséquente du jardin originel. Pour revenir animal, ou plante – nature sans fatalité. Jean Pierre Rehm